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Les échanges marchands : de l’estimation aux prix (Moyen Âge - Époque moderne)

École d’été d’histoire économique

mardi 28 février 2012, par Antoine Roullet

L’Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne et l’IUF organisent, en collaboration avec l’Université Toulouse II-Le Mirail et avec le soutien de l’AHEF et du Labex Hastec, une école d’été d’histoire économique. Celle-ci se déroulera àHyères du 24 au 26 aoà»t 2012 et son thème sera : Les échanges marchands : de l’estimation aux prix (Moyen Âge - Époque moderne). Cette école d’été est destinée àaccueillir, chercheurs, enseignants-chercheurs et doctorants en nombre égal. Quinze places sont disponibles, également réparties entre médiévistes et modernistes. L’organisation prendra en charge l’intégralité des frais de déplacement et de séjour.

Cet appel àcandidature est diffusé par Calenda.

Ce projet s’inscrit dans le cadre de la réflexion menée depuis plusieurs années dans le cadre du projet « Circulation des richesses et valeur des choses  ». Le volet le plus récent a été consacré àla notion d’expertise et àses différents champs d’application, àla construction de la figure de l’expert, aux compétences et savoirs spécifiques qu’elle suppose et a pris la forme de colloques réunis àToulouse en 2010 puis àValence (Espagne) en 2011. Ils seront suivis d’un troisième, organisé àla Casa de Velazquez àl’automne 2012 (http://lamop.univ-paris1.fr/spip.php?rubrique184).

Il s’agit donc relayer et d’étendre la collaboration en cours du Lamop (Paris 1), entre le CSIC/CCHS (Madrid), le FRAMESPA (Université de Toulouse 2) et la Casa de Velasquez.

Les conclusions encore partielles de la réflexion sur l’expertise poussent àson extension chronologique àl’époque moderne, celle où le concept d’expertise est formalisé en tant que tel, alors qu’il ne faisait l’objet d’aucune désignation spécifique au Moyen-Âge. Elles appellent aussi un élargissement permettant d’y associer des historiens de l’économie, des économistes et des spécialistes d’anthropologie économique, provenant de l’EHESS et de l’EPHE. L’école d’été organisée en aoà»t 2012 constituera donc le premier volet d’une entreprise plus vaste. Celle-ci associerait des chercheurs de plusieurs universités européennes et extra-européennes, dans une approche transdisciplinaire et comparative.

Le programme d’actions àvenir comprendra la réunion périodique de colloques internationaux en alternance avec l’école d’été. Ce projet enfin a reçu le patronage de l’Association des Historiens Economistes Français (AHEF).

Le but de cette première opération est tout d’abord pédagogique : informer des nouveautés méthodologiques et problématiques les doctorants ou jeunes chercheurs, assurer la communication entre chercheurs confirmés dans un cadre de discussion peu formalisé, organiser des débats entre doctorants. Il s’agit enfin d’assurer la communication scientifique entre médiévistes et modernistes qui sont fréquemment en décalage alors qu’ils ont souvent àconnaître des mêmes objets. Prenant la forme d’ateliers relativement informels où la plus large place sera laissée au débat, une école d’été est le meilleur endroit où ce type d’objectifs peut être atteint. Elle peut également fournir un cadre adéquat àla formulation des problématiques sur lesquelles doit fonctionner le programme sur l’expertise.

Thématique de l’opération :

Le thème retenu pour la session 2012 est intitulé Les échanges marchands : de l’estimation aux prix aux époques médiévale et moderne. On vise ày faire le point sur la question de la prisée des biens qui s’accomplit dans le cadre des échanges marchands, en parallèle et en interaction avec les estimations des experts (boni homines, huissiers-priseurs, professionnels ou marchands spécialisés, notaires etc.). Comment en arrive-t-on àdire, dans l’absolu, cela vaut tant et, dans le relatif, cela vaut plus (ou moins) que telle autre chose, produisant ainsi un savoir objectif qui détermine ensuite la décision et l’action ? L’attribution d’une valeur, mesurée grâce àun prix, est une opération évidemment complexe obéissant àdes règles dont la formulation est encore, pour les époques médiévales et modernes, en partie àdécouvrir et àénoncer. On est làau cÅ“ur de problèmes scientifiques vivants, très débattus et dont l’étude intéresse de nombreux doctorants, comme elle intéresse les chercheurs : il s’agit làd’un dossier ouvert, dont la présentation au cours d’une école d’été peut être très productive et inciter àde nouvelles recherches.

La question des techniques de l’échange et, surtout, celle de l’évaluation comme de la formation des prix fait en effet partie des questions centrales de l’histoire économique. C’est aussi l’une des plus complexes. L’enjeu épistémologique d’un tel angle d’approche est tout d’abord de saisir la valeur des choses, non comme une donnée substantielle ou objective qui s’imposerait aux acteurs et dont les historiens eux-mêmes n’auraient qu’àcollationner les traces éparses dans les sources dont l’histoire sociale classique a fait ses supports usuels, mais comme un « construit  » social dont les mécanismes de l’évaluation et de l’échange révèlent toute la complexité. L’histoire des prix a aussi une histoire, en elle-même intéressante et qui a fait l’objet de récentes et importantes mises au point qui feront l’objet d’une partie de la rencontre.

Le prix d’expert, comme l’intervention de l’expertise sont en effet la traduction de l’encastrement des relations économiques dans les relations sociales. La vérité du prix, ou le recours àun prix qui mesure effectivement la valeur d’usage de la chose cédée tout en tenant compte des variations du marché, est la traduction chiffrée, mesurée par une valeur monétaire, de cette étroite imbrication entre les deux ordres, l’économique et le social. Cela signifie que le prix est autant une mesure de la qualité de l’objet qu’une indication de la nature des relations existant àl’intérieur d’une communauté, des rapports de force qui se nouent dans l’échange, de la relation des hommes aux biens et au temps. C’est donc un problème qui ne relève pas de l’étude de simples mécanismes extérieurs àla société et àl’histoire et dont l’approche ne peut se résumer àune simple étude du jeu de l’offre et de la demande sur des marchés auto-régulés, ceux-ci n’existant pas aux époques que nous considérons.

La séparation entre l’estimation des experts et les prix des biens définis dans le cadre des échanges marchands est en partie factice, en dépit des usages des acteurs qui opposent àl’époque moderne les estimations « Ã juste valeur  » aux prix de marché. L’un des objectifs sera de rendre compte les dynamiques qui réunissent ces deux modes de prisée, àtravers le rôle des experts, le statut juridique de leurs évaluations et l’encadrement légal de leurs pratiques. Les contentieux judiciaires sont àcet égard d’un grand intérêt : ils sont bien documentés depuis la fin du Moyen Âge et durant toute l’époque moderne. Ils révèlent les recours possibles contre les estimations défectueuses, qui peuvent aller d’une expertise contradictoire, collégiale ou effectuée par deux professionnels désignés par les parties jusqu’àl’exposition en vente publique aux enchères des biens dont la valeur est incertaine et contestée. Si la mise en vente par adjudication constitue le moyen ultime de trancher entre des estimations divergentes, comme le mécanisme de fixation de prix « véritables  » qui peuvent être inférieurs ou supérieurs àla « juste valeur  », il faut se garder d’y voir l’expression de ce qui serait une vérité supérieure du marché pour les acteurs, qui plus est dans sa forme presque épurée du modèle néoclassique. L’intervention des experts s’impose en raison de ses deux facettes indissociables : l’appréciation de la qualité des biens, ou de leur authenticité pour les Å“uvres d’art, et la fixation d’un prix pour la mise en vente des biens, soit pour les transactions de gré àgré, soit pour les adjudications publiques.

Le rôle déterminant de l’expertise collective dans la fixation des prix est par exemple avéré dès le haut Moyen Âge dans le cadre d’échanges fonciers complexes requérant une mesure des surfaces, une connaissance de la fertilité et des potentialités d’un terrain, la connaissance aussi de sa position par rapport aux cours d’eau et aux voies de communication.

Durant l’époque moderne, le marché aux enchères d’Amsterdam fournit lui aussi des exemples d’expertise collective. En France, àl’époque moderne, les officiers chargés des prisées ne sont pas seulement tenus d’effectuer celles-ci « en conscience et eu égard au présent  » ; ils sont responsables de leurs estimations et tenus d’acheter eux-mêmes les biens meubles surévalués au point qu’ils n’aient pas trouvé preneurs dans les adjudications aux enchères. Ceci se traduit par une sous-évaluation de principe et précautionneuse, en particulier dans des sources telles que les inventaires après décès, et par des correctifs a posteriori pour parvenir àla juste valeur (« crue  »). L’inverse se produit avec les estimations fréquemment enflées des dots fixées par les contrats de mariage, qui sont, avec les estimations des partages successoraux, un autre mobile de litiges, de contentieux tranchés àl’amiable ou en justice, se soldant par des annulations ou des restitutions.

L’investigation des principaux lieux et modes de formation des prix, àl’époque médiévale, les marchés ruraux périodiques, mais aussi les études de notaire lorsqu’elles nous ont laissé des séries documentaires importantes ouvre ainsi des perspectives pour une compréhension rénovée de la production de savoirs, de normes et de pratiques de la mesure de la valeur. La confrontation des estimations dans les échanges marchands et non marchands est, lorsqu’elle est possible, extrêmement importante. C’est aussi le partage entre les estimations discrétionnaires et celles jugées incontestables ou justes qui sera interrogé, pour comprendre ses fondements. Le programme fera place àla diversité des biens, allant des terres aux objets de prestige ou aux objets précieux étudiés par les médiévistes, jusqu’aux actifs financiers ou aux titres de dette et aux services devenus objets d’estimations étuidés par les modernistes. Au cÅ“ur de ces recherches se trouve toujours, d’une manière ou d’un autre, la demande sociale d’expertise.

L’école d’été doit aussi être l’occasion d’une réflexion sur les appropriations historiennes des méthodes et des concepts des économistes dans leur diversité, de même que des analyses sociologiques, anthropologiques, ou de celles de l’ethnographie économique. Les options épistémologiques des historiens des économies du passé sont souvent orientées par la nature du matériau archivistique disponible, rarement comparable aux données agrégées produites pour l’histoire contemporaine. Mais elles sont aussi guidées par des conceptions plus ou moins explicites des critères de validation scientifique dont la pertinence variable pourra être exposée et discutée àl’occasion de l’école d’été (pourquoi la sérialité, les approches micro ou macro etc ?).

Organisation de l’école d’été :

L’école d’été, financée principalement sur les fonds IUF, devrait rassembler une trentaine de participants, 15 seniors et 15 juniors. Un appel àpropositions sera diffusé àcet effet. Un tel projet n’a de sens que s’il est aussi largement international que possible et si nous réussissons àattirer, outre des professeurs européens, américains ou autres, des étudiants de toute nationalité, mais comprenant àpeu près le français.

On a retenu, sur les trois jours, une organisation du travail quotidien autour de trois leçons, suivies de longues discussions et de débats.

Dans le but de faire participer plus activement les 15 chercheurs juniors, d’échanger des informations bibliographiques et de débattre de quelques classiques de l’historiographique économique, les jeunes chercheurs présenteront lors de l’école d’été un ouvrage d’histoire économique. La présentation de ce livre marquant et central dans leur formation aura lieu l’après-midi (durée : 15 minutes).

Lors des candidatures, les candidats indiqueront dans la fiche d’inscription trois ouvrages en les classant par ordre de préférence (pour éviter les doublons). Si leur dossier est retenu, nous leur indiquerons l’ouvrage àprésenter et àapporter physiquement (si possible) lors de l’école d’été.

Une réponse est souhaitée avant le 15 mars 2012, adressée àl’un des quatre organisateurs, afin que nous puissions commencer àlancer les opérations.

Contacts :

Katia Béguin, Katia.Beguin [at] univ-paris1.fr

Julie Claustre julie.mayade [at] univ-paris1.fr

Laurent Feller, feller [at] univ-paris1.fr

Emmanuel Huertas, emmanuelhuertas [at] yahoo.fr

Projet d’organisation du temps

1ere journée

8h30 : accueil + introduction

9h00 - 9h30 : historiographie/problématiques (méd.)

9h30 – 10h00 : historiographie /problématiques (mod.)

10h00 – 10h30h : discussion (30 mn)

10h30 - 11h00 : pause café (30 mn)

11h00 – 11h30 : approches économiques et/ou anthropologiques

11h30-12h00 : discussion

12h00 – 14h00 : repas

14h-15h45 : « Les classiques de l’histoire économique  » (7 ouvrages)

15h45-16h00 : discussion

16h00 : plage/visite/promenade

2e journée

9h00 - 9h30 : historio/problématiques (méd.)

9h30 – 10h00 : historio/problématiques (mod.)

10h00 – 10h30h : discussion (30 mn)

10h30 - 11h00 : pause café (30 mn)

11h00 – 11h30 : approches économiques et/ou anthropologiques

11h30-12h00 : discussion

12h00 – 14h00 : repas

14h-16h00 : « Les classiques de l’histoire économique  » (8 ouvrages)

16h00-16h15 : discussion

16h15 : plage/visite/promenade

3e journée :

9h00 - 9h30 : historio/problématiques (méd.)

9h30 – 10h00 : historio/problématiques (mod.)

10h00 – 10h30h : discussion (30 mn)

10h30 - 11h00 : pause café (30 mn)

11h00 – 11h30 : approches économiques et/ou anthropologiques

11h30-12h00 : discussion

12h00 – 14h00 : repas

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