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Une nouvelle édition de Montaigne.

Emmanuel Naya, Delphine Reguig-Naya et Alexandre Tarrête.

dimanche 27 septembre 2009, par Guillaume Berthon

Michel de Montaigne, Essais, nouvelle édition d’Emmanuel Naya, Delphine Reguig-Naya et Alexandre Tarrête, folio classique n° 4893 – 4894 - 4895.

Comme l’édition de Pierre Michel (Folio, 1965) dont elle prend la suite, cette nouvelle édition des Essais se fonde sur
l’Exemplaire conservé à la Bibliothèque municipale de Bordeaux, qui comporte deux zones de texte bien distinctes : une partie
imprimée (le texte de l’édition de 1588) et une partie manuscrite (les ajouts marginaux et corrections portés par Montaigne
après 1588).

Une police de caractères différente a été choisie pour signaler la partie manuscrite : les corrections et ajouts ont ainsi été
rendus immédiatement visibles. Dans la partie manuscrite, les crochets signalent la restitution de passages tronqués par le
massicot d’un relieur maladroit en recourant au texte de l’édition posthume (1595) pour reconstituer les fragments manquants.
Cette présentation en deux polices donne à voir les deux seuls états du texte qui ont une réalité matérielle et philologique : le
texte imprimé et le texte manuscrit (en faisant abstraction toutefois des ratures de la zone manuscrite, trop complexes à
indiquer dans une édition courante). Le lecteur peut ainsi saisir au premier coup d’œil l’importance des remaniements du texte
des Essais entre 1588 et 1592, sans recourir à un système complexe de variantes.

La ponctuation et les corrections autographes ont été intégralement reproduites, ce qui permet de lire le "langage
coupé" élaboré par Montaigne. D’autre part, la disposition typographique d’origine a été respectée : absence d’alinéa dans le
texte, notamment, disposition spécifique des demis-vers en colonne. Les citations en vers ne sont pas séparées du texte par un
saut de ligne : l’effet de continuité entre le texte de Montaigne et le texte rapporté s’en trouve accentué.

Les graphies et l’orthographe ont été modernisées pour faciliter la lecture (à l’exception toutefois des noms propres, que
Montaigne préférait conserver sous leur forme latine). La syntaxe et les accords de la langue du XVIe siècle ont été conservés.
De son monde crépusculaire au nôtre, l’éternelle jeunesse de Montaigne n’en finit pas de nous étonner. Il suffit d’ouvrir
les Essais pour entendre une parole incomparablement vivante et accorte, qui s’offre à nous entretenir de tous les sujets
possibles. Montaigne est constamment en mouvement : enquêtant, citant un témoignage décisif, s’indignant, s’amusant, rêvant,
changeant de sujet, s’excusant, apostrophant son lecteur : « Je parle au papier comme je parle au premier que je rencontre » : il
a voulu écrire comme il conversait, dictant ses réflexions à un secrétaire tandis qu’il déambulait librement dans sa « librairie »,
cette bibliothèque qu’il fit aménager et décorer de fresques et d’inscriptions, au deuxième étage de la tour d’angle de son
manoir périgourdin. Composition à bâtons rompus, associations d’idées, tournures orales, style familier, ironie et prise à partie
du lecteur : Montaigne semble littéralement sortir des pages pour venir nous offrir des « essais en chair et en os ». Les Essais
sont à peine un livre, ils sont une conversation à laquelle nous avons le privilège de pouvoir nous joindre. C’est non seulement
avec Montaigne qu’il nous est donné de nous entretenir, mais c’est encore avec les auteurs anciens et modernes, avec les grands
de France et de Navarre, avec les paysans de Guyenne, avec les savants et les simples, les sages et les fous, avec les Cannibales
du Brésil ou avec les sorcières de Lorraine. Car selon Montaigne, la lecture comme la conversation doit être un art de conférer,
c’est à dire de comparer et de confronter son opinion avec d’autres opinions : c’est au miroir de l’altérité que l’on pourra mieux
se connaître soi-même.

De quoi parle-t-on dans les Essais ? De tout, littéralement. De la vertu et du plaisir, de la santé et de la mort, de la fin et
des moyens, de la servitude et de la liberté, de littérature et de philosophie, de l’enfance et de la vieillesse, et parfois aussi de la
vanité, sujet moins vain qu’il n’y paraît. Sur tous ces sujets, il s’agit de se confronter aux meilleurs écrivains et philosophes des
siècles passés.

Il fallait remplacer une édition agréable, mais périmée, par une nouvelle, qui tienne compte des travaux les plus récents.
Les éditeurs, jeunes universitaires de Paris IV et de Lyon II, donnent une version qui n’est ni celle de la Pléiade (texte revu par
la « fille d’alliance » de Montaigne en 1595), ni celle de Quarto (qui est une traduction). Proust et Balzac figurent de même
dans ces trois collections : ce sont les trois « sommes » (et peut-être les trois sommets) de la littérature française.

Attachée de presse : Frédérique ROMAIN 01 49 54 43 88 / frederique.romain@gallimard.fr

Assistée de : Séverine LAVELLE 01 49 54 15 66 / severine.lavelle@gallimard.fr

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